Ascension, de Ludwig Hohl

Ce petit récit met simplement en scène deux compagnons qui partent à l'assaut d'un pic montagneux. Je ne parle qu'en profane des sommets, mais leur aventure m'a fait les suivre à des hauteurs inexplorées, celles de la montagne, cet "immense navire", qui vous attire au large, vers la liberté redoutée, au risque de miles périls.

Ull et Johann, les deux compagnons de cordée, n'escaladent pas la même forteresse. L'un se dépasse, l'autre recule. Quand l'un renonce, l'autre fonce. Le lecteur accompagne donc Ull dans sa folle ascension solitaire, franchit avec lui les étapes périlleuses des crevasses, de la nuit, des silences millénaires et des dangers qui guettent l'alpiniste téméraire. Dans des chemins délaissées par la civilisation, où l'homme se trace une route qui ne laisse pas de traces et où la nature punit toute folie d'orgueil, l'humilité seule peut sauver ces deux hommes; leur orgueil les aveugle.

La montagne, ses formes inquiétantes et ses ombres fantastiques qui se dressent tel un rempart, ses pics, ses rocs, son glacier, ses arêtes, et tout ce que l'homme dans sa démesure, tente de conquérir pied à pied, va se charger de rappeler à ces deux insensés que le point le plus proche du Sommet est... l'Abîme.  Ludwig Hohl illustre brillamment cette phrase de Jacques Attali: "Les leçons de l'Histoire enseignent que le sommet est le point le plus rapproché du précipice."

Un très beau livre, à propos duquel Jean-Pierre Enard a laissé ce commentaire: "Nous n'aimons guère les grands mots. Ici, pourtant, on ne peut guère les éviter: il s'agit d'un chef d'oeuvre."